Six ans après la fusion des deux bourses d’Afrique centrale, celle de Douala (DSX) et celle de Libreville (BVMAC), les marchés financiers de la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale) peinent toujours à décoller. Faiblement capitalisés, peu liquides, peu accessibles, ils restent marginalisés dans le financement des économies sous-régionales, à l’opposé des ambitions affichées.
Aujourd’hui, le marché boursier unifié compte moins de 25 titres cotés, dont une majorité d’obligations souveraines. La capitalisation boursière reste dominée par le Cameroun, qui représente à lui seul près de 70 % de l’activité, creusant un déséquilibre notoire au sein d’un espace communautaire qui peine à harmoniser les contributions. Les entreprises privées, quant à elles, y sont presque absentes, rebutées par la complexité des procédures d’introduction, les exigences réglementaires rigides et le manque d’incitations fisc vaales harmonisées.
Malgré la présence de la COSUMAF (Commission de surveillance du marché financier), censée assurer la régulation et la confiance des investisseurs, les obstacles structurels demeurent : lenteurs administratives, absence d’un écosystème financier solide, méfiance des investisseurs institutionnels et faible culture boursière. À cela s’ajoute une gouvernance fragmentée entre États, régulateurs et la BEAC, qui bride l’intégration effective du marché.
La BVMAC, elle, tente tant bien que mal de réagir. Des projets de numérisation, d’assouplissement des conditions d’accès pour les PME et une meilleure articulation avec le marché monétaire régional ont été lancés. Mais l’impact reste pour l’heure marginal, faute de volonté politique commune et d’un véritable leadership régional.
Pour sortir de cette anesthésie prolongée, plusieurs leviers doivent être activés : renforcer la coordination entre les États, mobiliser les caisses de retraite et compagnies d’assurance vers le marché, simplifier les démarches pour les entreprises, et surtout mener une pédagogie active auprès du grand public.
En l’état, les marchés financiers de la CEMAC demeurent un outil institutionnel plus symbolique qu’opérationnel. Si aucune impulsion décisive n’est donnée, ils risquent de devenir une coquille vide, incapable d’accompagner les transitions économiques que réclame une sous-région à la recherche de souveraineté et de croissance endogène.
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