Dans les open spaces surchauffés de Douala comme dans les bureaux feutrés de Yaoundé, la question de la santé mentale au travail s’impose doucement, encore lestée de silence. Burn-out, anxiété, stress chronique : autant de mots que l’on murmure, que l’on camoufle derrière des arrêts maladie ou des performances en chute libre.
Pourtant, les chiffres sont édifiants. Selon plusieurs études récentes, plus de 60 % des professionnels de santé camerounais présentent des signes d’épuisement professionnel. Dans certains secteurs comme l’enseignement ou l’armée, les taux flirtent avec les 80 %. Et pourtant, le sujet demeure un angle mort des politiques de ressources humaines.
Quelques entreprises pionnières, souvent étrangères ou du secteur bancaire, commencent timidement à réagir. Cellules d’écoute, ateliers bien-être, droit à la déconnexion… Des embryons de réponse, encore marginaux. Car le vrai mur est culturel. Dans une société où montrer ses fragilités est perçu comme un aveu d’échec, le mal-être psychique est souvent nié, ou tu.
Le ministère de la Santé annonce vouloir faire de la santé mentale une priorité, mais les moyens restent dérisoires : une poignée de psychiatres pour 27 millions d’habitants. Dans ce désert thérapeutique, la détresse psychologique s’accumule en silence, au cœur même de la machine productive.
Faire de la santé mentale au travail une cause nationale, ce serait reconnaître que le bien-être n’est pas un luxe, mais un moteur. Et qu’aucune économie ne peut prospérer sur des esprits brisés.
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