La récente désignation d’un ministre intérimaire au Cameroun ne relève pas d’un simple ajustement administratif. Elle porte la marque silencieuse du Sphinx d’Etoudi, maître du tempo et de l’équilibre subtil. En creux, cette décision révèle une stratégie à plusieurs détentes : prudence politique à l’approche des élections, rationalisation budgétaire et message géopolitique à l’adresse du Septentrion. Entre immobilisme apparent et manœuvre fine, l’intérim devient l’art de gouverner en équilibre, sans bruit, mais non sans dessein._
Il y a des décisions qui tonnent, d’autres qui s’égrènent à pas feutrés. Et puis, il y a celles qui s’installent, discrètes et chirurgicales, dans le silence assourdissant de la stratégie politique.
La désignation d’un intérimaire à la tête d’un département ministériel n’est pas, dans le Cameroun de juin 2025, un simple choix technique. Elle est tout à la fois un signal, un symbole, une manœuvre. Une manœuvre raffinée, au service d’une stratégie gouvernementale de contention à trois volets, aussi subtile qu’efficace.
Le subterfuge administratif
À l’heure où les salons bruissent de rumeurs de remaniement, voici un intérim. Ni fracas, ni révolution protocolaire. Juste un glissement feutré.
Recourir à l’intérim, dans ce contexte, c’est différer sans refuser. C’est gouverner sans déranger. C’est agir sans déclencher de secousses.
Une façon douce d’éteindre les attentes avant l’heure électorale. En d’autres mots, un acte de gestion transitoire… qui prend racine dans la prudence d’un pouvoir qui connaît les vertus du silence.
Et dans cette partition à plusieurs portées, on retrouve la main invisible du Sphinx d’Etoudi, ce maître des équilibres souples, qui gouverne par glissements imperceptibles, préférant la dentelle institutionnelle au fracas des ruptures.
Le pragmatisme budgétaire
Sous la ligne claire du décret, une logique plus austère s’invite. Celle des équilibres financiers.
En fondant temporairement deux départements ministériels (celui de la Jeunesse et celui de la Formation professionnelle), le pouvoir donne à voir une possible préfiguration d’une refonte gouvernementale, plus ramassée, plus sobre, plus efficace, du moins en apparence.
Dans une conjoncture faite de révisions budgétaires et de financements conditionnés, la jonction entre les politiques de jeunesse et de formation dessine une économie de moyens et une vision plus intégrée des besoins des jeunes groupes sociaux.
Ce n’est plus seulement une gestion d’urgence. C’est aussi une esquisse de réforme. L’intérim n’est pas ici une parenthèse, mais un laboratoire d’un gouvernement de demain, plus resserré, plus stratégique.
La géopolitique en sourdine
Et comme souvent au Cameroun, le choix de l’homme compte autant que la fonction.
Faire porter cet intérim par un fils de l’Extrême-Nord n’est pas neutre. C’est un clin d’œil politique, un rappel géostratégique. Depuis la recomposition de l’ex-province du Nord, les équilibres régionaux sont devenus plus sensibles, plus précieux, plus volatils.
La nomination actuelle chuchote au Nord que le Renouveau garde un œil, un bras, une mémoire tournés vers lui. Et que, dans les rapports de force à venir, mieux vaudra marcher avec le pouvoir que s’en écarter.
L’Extrême-Nord, en acceptant ce flambeau provisoire, accepte aussi une forme de pacte. Il y a là, comme une injonction douce : accompagner pour ne pas être relégué, s’aligner pour ne pas s’effacer.
L’intérim est donc bien plus qu’une fonction temporaire. Il est ici un langage politique. Une réponse sans éclats à une conjoncture sans certitudes.
Ni remaniement, ni immobilisme. Juste ce qu’il faut de mouvement pour laisser croire à la continuité, tout en préparant, peut-être, le prochain saut.
En somme, une transition tranquille, calculée, pesée au millimètre.
Et pendant que la République retient son souffle, l’intérim s’installe…
Comme un miroir prudent tendu à l’avenir. Et dans le reflet, le Sphinx sourit.
Face à l’Atlantique, le 28 juin 2025
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