Une ultime réunion du du Groupe de Travail chargé de formuler des propositions consensuelles pour la supervision des activités des Caisses des Dépôts et Consignations et la gestion des avoirs en déshérence dans la Cemac était prévue ce mois de mars 2025. Elle n’aura plus lieu. Sans aucune explication de la BEAC et la Cobac, principales organisatrices.
C’est l’incompréhension parmi les membres du Groupe de Travail chargé de formuler des propositions consensuelles pour la supervision des activités des Caisses des Dépôts et Consignations (CDC) et la gestion des avoirs en déshérence dans la Cemac. Personne n’a reçu d’invitation au sujet de « l’ultime réunion prévue au mois de mars 2025 ». Impossible de savoir si elle a été ajournée ou annulée. Ni la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC), à l’initiative de ce groupe de travail, ni la Commission bancaire da l’Afrique centrale (Cobac), qui en assure le secrétariat, ne donnent d’explication pour ce contretemps. C’est le silence radio. Ce qui en rajoute à la confusion.
Annoncée le 12 février dernier, à l’issue de la deuxième réunion, par un communiqué de presse du gouverneur de la BEAC, Yvon Sana Bangui, par ailleurs président de la Commission bancaire da l’Afrique centrale (Cobac), cette rencontre était très attendue par les acteurs du système financier de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Et pour cause, c’est au cours de ce rendez-vous (désormais) manqué que devaient être examinées « les nouvelles propositions » sur les points se rapportant notamment aux différentes options de supervision des caisses de Dépôts et Consignations ainsi qu’aux modalités de régulation des fonds en déshérence « avant de soumettre les projets de textes aux Organes compétents de la Cemac. »
Consensus en trompe l’œil
Pour Yvon Sana Bangui, la deuxième réunion du groupe de travail a été marquée par des « échanges très fructueux et constructifs, les propositions pertinentes ont été approuvées et seront intégrées dans les nouvelles versions des avant-projets de textes. » Il s’agit des deux avant-projets de règlement Cemac élaborés par le Secrétariat Général de la Cobac, à savoir : « l’avant-projet de règlement Cemac relatif aux conditions d’exercice et à la supervision des CDC » et « l’avant-projet de règlement Cemac relatif au traitement des comptes inactifs et des avoirs en déshérence dans les livres des établissements assujettis à la Cobac. »
Au regard des enjeux qu’elle charrie, la question de la supervision des activités des CDC et la gestion des avoirs en déshérence dans la Cemac a pris les allures d’un conflit juridico-politique avec en toile de fond le débat sur la primauté entre intérêt national et communautaire dans un contexte d’intégration régional. Bien plus, des sons dissonants s’élèvent au sein du groupe de travail pour contester l’orientation des « les nouvelles propositions ».
Au cours de l’émission dominicale, « Dimanche midi » diffusée le 23 février 2025 sur les ondes de la chaîne de radiodiffusion publique du Cameroun, CRTV, l’on apprend qu’au cours de la deuxième réunion du Groupe de travail mis en place par le gouverneur de la BEAC, le directeur général de la Caisse des Dépôts et Consignations du Cameroun (CDEC), Richard Evina Obam qui en est membre statutaire, s’est « opposé avec véhémence à la supervision des activités des caisses des dépôts et consignations par la Cobac. » Le plénipotentiaire du gouvernement camerounais propose « le retrait de l’avant-projet de Règlement et la restriction des interventions de la Cobac aux seules opérations bancaires résiduelles. »
Fuite en avant
D’ailleurs, Richard Evina Obam a dit se préparer à « défendre cette position officielle de l’Etat du Cameroun au cours de la prochaine réunion du Groupe de travail de la BEAC prévue au mois de ce mars 2025. » A présent que le rendez-vous a plus eu lieu mieux, que la réunion n’a pas été organisée par « qui de droit », que faut-il en conclure ?
Certains observateurs pensent que pour ne pas perdre la face au regard des éléments préparés par le Cameroun pour défendre sa cause, la BEAC et la Cobac ont préféré la fuite en avant ; une manière de gagner du temps. En effet, dans la loi de finances 2025, le Parlement camerounais conforte le gouvernement dans son option de faire de la CDEC un établissement public relevant de la souveraineté nationale.
Selon le juriste Dr. Abdouraoufi Ibrahim, Directeur des affaires juridiques de la CDEC, par l’article quatre-vingt troisième de la loi de finances 2025 intitulé « Dispositions générales relatives aux deniers publics destinés à la Caisse de Dépôts et Consignations (CDEC) », le législateur camerounais apporte deux précisions importantes au débat en cours. « D’abord, il consacre le statut de ‘‘deniers publics’’ des fonds dévolus à a CDEC. Ensuite, cette disposition permet de clore un potentiel débat et un motif dilatoire auquel penserait sans doute la corporation bancaire. » En ce sens, le législateur conforte la direction de la CDEC sans son action.
Dans les couloirs de la CDEC, on aime à imaginer que cet article de la loi de finances 2025 du Cameroun soit l’objet d’une lecture assidue au sein du groupe de travail de la BEAC en vue d’une « réplique ». Ce qui n’est pas une moindre raison pour justifier le report(?) de « l’ultime réunion prévue au mois de mars 2025 ».