Le gouvernement cherche un cabinet chargé de mener l’étude actuarielle de faisabilité d’une Caisse Nationale des Personnels de l’Etat au Cameroun. Un projet annoncé depuis 2006. Jusque-là, le système de retraite de la fonction publique est structurellement déficitaire, avec un déficit cumulé de plus de 430 milliards de FCFA entre 2011 et 2020.
En vue de moderniser et de dynamiser le sous-secteur du Travail et de la sécurité sociale en 2023, le gouvernement vient de relancer le processus de réforme du système de retraite des agents publics. Le 16 avril 2025, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale (Mintss), Grégoire Owona, a lancé un appel d’offres national pour recruter un cabinet chargé de mener l’étude actuarielle de faisabilité d’une Caisse Nationale des Personnels de l’Etat (CNPE). Cette décision survient plus de deux ans après que le Chef du gouvernement en a fait l’annonce.
En effet, c’est le 20 novembre 2022, au cours de la présentation du Programme économique, financier, social et culturel du gouvernement pour l’exercice 2023 à l’Assemblée nationale que le Premier ministre Joseph Dion Ngute a annoncé la réalisation d’une étude de faisabilité de la mise en place d’une Caisse Nationale des Personnels de l’Etat. Pour l’instant, les pensions des fonctionnaires sont payées par le Trésor public. Ceux des agents contractuels de l’administration centrale le sont par la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS) ou « toute autre caisse de retraite », précise le statut général de la fonction publique. Ce texte qui date d’octobre 1974 ouvre donc la possibilité de la mise en place d’une Caisse dédiée à la gestion de la retraite des personnels de l’État.
Au-delà de la fonction publique, les besoins primaires de protection sociale minimale s’avèrent insuffisants au Cameroun. L’état des lieux en la matière n’est guère reluisant. Selon l’annuaire statistique de la CNPS, l’organisme public de prévoyance sociale au Cameroun, 1 294 526 personnes étaient assurées au 31 décembre 2023 dont 1 029 323 travailleurs du secteur privé, 2702 travailleurs domestiques et 262 501 assurés volontaires. Ce modèle à deux vitesses, explique le faible taux de couverture sociale, estimé à moins de 10% des 13 millions de personnes qui constituent la population active sur 26 millions d’habitants. Dans sa stratégie de modernisation, l’État ambitionne de porter ce taux à 50 % d’ici 2030. Cela passera notamment par la création de structures spécialisées comme la CNPE.
Déficit structurel
En fait, le dossier de la CNPE est dans l’agenda du gouvernement depuis plusieurs années. C’est dans cette perspective que la stratégie sectorielle de développement social s’attèle, depuis 2006, à la création de trois structures devant suppléer la CNPS, à savoir, la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), la Caisse nationale des personnels de l’Etat (CNPE) et la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM).
Ainsi, la différence d’autre pays, le Cameroun n’a pas de structure dédiée à la gestion du système de retraite de la fonction publique. Ce qui ne donne pas de lisibilité sur la santé financière du système. En attendant l’avènement de la CNPE, le système de retraite de l’administration publique affiche un déficit structurel croissant depuis 2011. Selon une évaluation de la direction générale du budget du ministère des Finances (Minfi) avec l’appui technique du fonds monétaire international (FMI), le déficit cumulé du système de retraite dans l’administration publique camerounaise sur la période 2011-2020 est estimé à 453,1 milliards de FCFA.
Alors que les fonctionnaires et autres agents de l’Etat ont versé des cotisations sociales de 60 milliards de FCFA 2022 et 55,4 milliards en 2021, ils ont perçu des pensions retraite de 370,5 milliards en 2022 et 235,7 milliards en 2021. Sur la période sous revue, le gap entre les retenues opérées pour cotisations sociales et les pensions versées est passé de 22,8 milliards FCFA en 2011 à 73,2 milliards en 2020, soit une hausse de 222%. Résultat, le régime de pensions des agents publics de l’Etat fait partie des dix risques budgétaires majeurs identifiés par FMI. Illustration : « pour payer les prestations en 2020, l’État a dû financer un déficit de 91,6 milliards sur les pensions des fonctionnaires et militaires », souligne-t-on au Minfi.