Le phénomène du « Zoua Zoua » s’est accentué dans le septentrion camerounais, où le carburant frelaté s’impose malgré la rigueur des autorités. Selon les données officielles de l’Agence Nationale de Régulation du Marché du Carburant, environ 12 % du carburant consommé dans la région est de provenance illicite, ce qui représente près de 15 millions de litres annuels sur un marché officiel de 80 millions de litres à l’échelle nationale. Le ministère de l’eau et de l’Énergie indique que l’utilisation de ce carburant, dont la composition présente une teneur en additifs nocifs jusqu’à 25 % supérieure aux standards homologués, expose les moteurs à des dégradations rapides et accroît les risques sanitaires. En octobre 2024, une opération de contrôle dans la région de l’Est a permis de saisir 3 640 litres de carburant frauduleux, illustrant l’ampleur d’un marché parallèle qui ne cesse de croître. Les prix pratiqués sur ce marché noir se situent en moyenne 35 % en dessous de ceux affichés dans les stations-service légales, une différence qui attire une population dont le revenu mensuel moyen ne dépasse pas 40 000 FCFA, dans un contexte où le taux de chômage atteint environ 18 %. Les pertes fiscales annuelles dues à ce trafic se chiffrent à près de 50 milliards de FCFA, soit environ 4,2 milliards par trimestre, d’après un rapport récent du Ministère des Finances. Face à ce constat, les autorités multiplient les opérations de contrôle et les campagnes de sensibilisation afin de freiner la propagation de ce phénomène qui fragilise l’économie régionale. Des experts estiment que la réhabilitation du secteur passe par le renforcement des infrastructures de distribution et une réforme en profondeur du marché énergétique, avec la mise en place de mesures strictes pour assurer la traçabilité et la qualité des produits distribués. Dans le cadre de la coopération régionale, des négociations avec le Nigeria, principal fournisseur du carburant frelaté, sont en cours afin d’harmoniser les normes de qualité et de limiter l’importation de produits non conformes. Ce plan d’action, qui implique une coordination étroite entre les autorités locales, nationales et partenaires internationaux, vise à restaurer la confiance dans le marché du carburant et à redynamiser l’économie du septentrion. La lutte contre le « Zoua Zoua » apparaît ainsi comme une urgence économique et sanitaire, nécessitant des investissements ciblés et une mobilisation sans précédent pour enrayer ce commerce illicite et sécuriser l’avenir énergétique du Cameroun.