Alors que les appels à une rationalisation des organisations régionales africaines se multiplient, le processus de convergence entre la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) et la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (Ceeac) reste suspendu à des arbitrages essentiellement économiques et monétaires. Loin des slogans politiques, c’est bien la question de la cohérence macroéconomique régionale qui freine l’intégration effective.
La Cemac, avec ses six États membres, dispose d’outils d’intégration plus poussés : une union douanière, une banque centrale commune (BEAC), une monnaie unique (le franc CFA), et des mécanismes de coordination budgétaire via le Programme de Réformes Économiques et Financières (PREF-Cemac). La Ceeac, en revanche, regroupe onze pays, dont l’Angola et la RDC, en dehors de l’espace CFA, avec des trajectoires monétaires et budgétaires hétérogènes. Ce décalage rend toute harmonisation structurelle complexe.
L’un des principaux points de blocage réside dans l’absence de cadre budgétaire régional commun. Si la Cemac a mis en place une surveillance multilatérale, la Ceeac reste à la traîne sur la discipline macroéconomique. Le manque de convergence des politiques fiscales, l’absence de normes communes de gestion publique, et les disparités en matière de dette et d’investissement public empêchent toute cohérence économique d’ensemble.
En outre, la question de la contribution financière des États membres fragilise le fonctionnement des deux institutions. Les retards de paiement, fréquents, plombent la capacité des deux entités à planifier et exécuter des projets d’intégration, notamment dans les infrastructures et les corridors logistiques.
La construction d’un espace économique cohérent en Afrique centrale ne pourra se faire sans un alignement des stratégies de financement, une intégration progressive des marchés financiers, et une gouvernance budgétaire plus rigoureuse. Un scénario de fusion institutionnelle n’aurait de sens que s’il s’accompagne d’une feuille de route réaliste pour une convergence macroéconomique. Faute de quoi, les doubles structures continueront d’alimenter la fragmentation d’un espace régional déjà peu compétitif à l’échelle continentale
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