Dans sa stratégie de captation des financements innovants, le Cameroun fonde beaucoup d’espoirs sur les obligations vertes. Ce sujet était à l’ordre du jour du roadshow sans opération d’emprunt immédiate – qualifié de « non-deal roadshow » – conduit récemment par le ministre des Finances Louis Paul Motaze aux Etats-Unis et en Angleterre.
En quête de capitaux et d’une meilleure crédibilité sur les marchés internationaux, le gouvernement camerounais entend actionner le levier des financements innovants et particulièrement le segment de la finance climatique. A l’occasion de l’atelier de consultation des parties prenantes organisé le 4 avril 2025 à Yaoundé, le gouvernement, en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), la Banque Européenne d’Investissement (BEI) et le Fonds Vert pour le Climat (FVC), a exprimé sa ferme volonté de mobiliser des ressources financières pour accélérer sa transition vers une économie bas carbone.
Cette rencontre a servi de cadre au lancement officiel de l’initiative mondiale des obligations vertes (GGBI). Ce faisant, « le Cameroun fait ainsi partie des 10 pays ciblés par la phase pilote de l’initiative mondiale pour les obligations vertes », se réjouit le directeur général du trésor, de la coopération financière et monétaire (Dgtcfm), qui représentait le ministre des Finances. Pour Sylvester Moh Tangongho, le lancement de la GGBI est un tournant décisif dans la stratégie nationale de financement climatique et une étape cruciale pour un avenir durable du Cameroun. Rappelant qu’en matière de finance climatique, le pays a réalisé de gros progrès, notamment l’élaboration du premier budget climato-sensible et la mise en place d’un cadre environnemental, social et de gouvernance (ESG) structurant les projets éligibles aux financements durables.
Le Dgtcfm souligne que l’adhésion du Cameroun à la GGBI permettra de renforcer l’accès aux financements verts, une nécessité pour répondre aux défis climatiques et économiques du pays. Le programme GGBI vise à mobiliser des investissements privés et à accompagner les émetteurs d’obligations vertes à travers une assistance technique et un renforcement des capacités. Cette initiative s’inscrit dans les engagements du Cameroun au titre de l’Accord de Paris et de ses Contributions Déterminées au niveau National (CDN).
Sur les pas du Gabon
Du 12 au 18 mars 2025 en effet, le ministre des Finances Louis Paul Motaze, à la tête d’une délégation d’experts gouvernementaux, a multiplié les rencontres aux Etats-Unis (New York et Boston) et en Angleterre (Londres) où il a rencontré plus de 200 investisseurs internationaux. Lors de certaines de ces réunions, le ministre a présenté notre programme environnemental, social et de gouvernance (ESG) établi avec l’appui de Citi Bank puis validé par le Premier ministre, Chef du gouvernement, et qui a été évalué par les agences de notation financière Standard&Poors et Moody’s », indique Sylvester Moh Tangongho. Selon les experts, le cadre ESG est le référentiel de base pour participer à la GGBI. « Les investisseurs se sont montrés très enthousiastes par rapport au programme ESG du Cameroun. Grâce à notre ESG, le travail va être plus facile pour bénéficier ces financements innovants, des prêts à long terme à des taux très bas », précise-t-il.
Pour passer des intentions à l’acte, le Cameroun peut utilement s’inspirer de l’exemple de son voisin gabonais. Le pays de Brice Clotaire Oligui Nguema est pionnier en la matière. Le 25 juillet 2023, le pays a été le premier en Afrique à émettre avec succès une obligation verte à travers le mécanisme « Échange-dette nature ». Concrètement, explique l’analyste financier Camerounais Jean Marie Biada, « cette démarche a permis au Gabon de racheter 436 millions de dollars (261,6 milliards de FCFA) de son euro-obligation 2025 et des deux euro-obligations 2031 ».